p.1 MUSÉE UNIVERSELH3lit desséché d’un torrent. Je ne vois pas encore d’étoiles ; c’est bien là pourtant le ciel de là-haut, nuit sans lune, calme et pure, animée d’une douce lueur bleue.« Ne croyez-vous point voir passer sur le ciel des nuées blanches et légères? Comme le silence est profond ! quelle immobilité dans cette mer sereine ! quelle est donc cette contrée aride, muette, désolée, où la nature perd jusqu’à ce vague et léger mur¬ mure qui accompagne son sommeil? Vous écoutez, vous retenez votre haleine : non, pas un bruit, pas un souffle, pas une brise tiède et vivifiante dans cet air glacé ! Vous vous croiriez sur une de ces planètes mortes et nues, où la nature minérale règne au sein d’une solitude silencieuse et terrible, sur quelque terre que le soleil ne chauffe pas, et où il n’anime aucun genre de vie. »Ces curieux effets de ciel étoilé sont obtenus par le reflet des torches projeté de différents endroits sur la voûte de la salle, qui est d’une autre espèce de pierre que les murailles.Après ce spectacle, on voit d’un œil presque in¬ différent la Grotte des fées, avec ses milliers de sta¬ lactites rangées en colonnades et formant des arceaux d'un aspect féerique; la mer morte, avec ses eaux aussi transparentes que l’air, ses poissons aveugles, ses crapauds et ses grillons d’un genre tout à fait à part. Le gouffre du Maëlstrom, avec sa sombre hor- jreur, peut à peine réveiller la curiosité du voyageur qui parcourt depuis six heures ce monde souterrain, et qui n’en a vu pourtant qu’une partie; car des touristes plus aventureux se sont avancés bien plus loin, sans rencontrer jamais la fin de ces excava¬ tions.A trois lieues de l’entrée, et après avoir parcouru un nombre de kilomètres difficile à déterminer, puisque pour arriver à la Grotte des fées il en faut faire seize, on parvient à la sortie, vers laquelle on arrive par une étroite galerie dans laquelle on est forcé de marcher en rampant. Délicieuse est l’im¬ pression produite par la lumière du soleil, qui ap¬ paraît alors comme un astre bienfaisant et créa¬ teur. On comprend plus facilement que les premiers humains qui habitèrent si longtemps les cavernes, lui aient rendu un culte et élevé des autels.Dans un autre article nous parlerons des grottes à ossements et de leur importance au point de vue des études préhistoriques.ALFRED D’OTTENS.EXPOSITION GÉNÉRALE DES ŒUVRES DE BARYEAU PALAIS DES BEAUX-ARTSLorsque, vers 1867, je crois, Barye, à force de chefs-d’œuvre, se fut rendu digne d’aller s’asseoir sous la coupole du palais de l’Institut, au milieu desgrands artistes qui y représentent la gloire de l’art français, l’un d’eux, à la fin de la séance de récep¬ tion, s’approcha courtoisement du nouvel académi¬ cien et, avec un sourire gracieux, lui dit du ton le plus aimable :« Permettez-moi, mon cher collègue, de vous expri¬ mer le plaisir que j”ai à faire votre connaissance. J’avais déjà plusieurs fois entendu prononcer votre nom, mais, je dois vous l’avouer, je ne connais aucune de vos œuvres. Puisque nous devons néces¬ sairement, à l’avenir, avoir ensemble des rapports fréquents, je serais bien aise de savoir ce que vous avez fait, et vous seriez bien aimable de me rensei¬ gner sur les moyens de satisfaire ce désir. »Ne croyez pas que cet aimable collègue cédait au plaisir de lancer une épigranime, comme cet autre qui s’écriait : cc Depuis quand les Tuileries sont-elles devenues une ménagerie? » Oh non! Il voulait tout uniment savoir à qui il avait affaire et quel collègue lui imposait le vote de ses confrères, ce qui était bien naturel; il ignorait totalement les œuvres de cc nommé Barye qu’on introduisait ainsi de but en blanc à l’Institut, ce qui n’est pas .moins naturel chez un membre de l’Académie des Beaux-Arts; il désirait combler cette lacune en prenant ses rensei¬ gnements à la source la plus sûre, auprès de l’intrus lui-même, Quoi de plus simple, quoi de plus correct que tout cela ?C’est ce que Barye comprit immédiatement sans se laisser troubler de ce qu’un esprit mal fait aurait pu soupçonner dans cette démarche; il se mit à la disposition de son bienveillant et curieux confrère, qui put ainsi commencer ses investigations, sans craindre de perdre ses pas. Sous la direction de Barye, il découvrit à la porte du jardin des Tuileries le Lion assis ; à la descente de la terrasse du bord de l’eau le Lion au serpent, sur la place de la Bastille le Lion de la colonne de Juillet, dans la cour du Louvre les quatre groupes colossaux des pavillons Denon et Mollien : la Guerre, la Paix, la Force, YOrdre, et enfin toute cette série de chefs-d’œuvre, le Tigre dévorant un crocodile, Thésée et le Minotaure, Angélique et Roger sur fHippogriffe, le Jaguar dévo¬ rant un lièvre, le Centaure et le Lapithe, etc., etc.— Voir la suite au catalogue.On dit que, après cette visite, l’immortel se déclara satisfait, et qu’il reconnut qu’il pouvait, sans déro¬ ger, permettre à Barye de s’asseoir à côté de lui. D’autres eurent plus de fermeté et ne pardonnèrent pas si facilement à ce cc faiseur de bêtes » d’exposer, par sa présence, l’Institut à être considéré comme une succursale du Jardin des Plantes.Cela peut paraître bien étrange. C’est le contraire qui devrait surprendre. Toute Académie, par sa constitution même, est une aristocratie et une oligar¬ chie. Si elle l’osait, elle se coifferait volontiers de la perruque de Louis XIV. Elle lui emprunte du moins p.2 sans transcription p.3 sans transcription p.4 sans transcription