Lettre d'une personne non identifiée à Antoine-Louis Barye du 20 février 1864

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COMMISSARIAT
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de Police.
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QUARTIER
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Notre-Dame
Paris , le 20 février 1864
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Monsieur,
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J'ai bien retardé pour vous témoigner
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toute ma reconnaissance, mais j'ai été assez
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longtemps malade, puis des affaires assez longues
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et mon secrétaire malade à son tour. Si mon
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admiration pouvait augmenter, je retarderais encore
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mais il me serait impossible d'admirer davantage
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comme détails, comme pose, comme silhouette, comme
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ensemble tout est irréprochable, l'action est remplie
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d'intérêt, votre Lion est bien le Roi des animaux.
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Il est l'emblème de la force et de la vigueur et j'aime
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cette exécution vigoureuse. Je ne sais pas si je
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me trompe, la plastique est d'une difficulté immense
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pour rendre les effets d'un mouvement par trop précipité
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et il faut votre magnifique talent pour avoir su
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rendre avec un rare bonheur cet instant de repos
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animalier même de l'action qui indique le mouvement
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du lion pour écraser le Serpent.
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Mais je ne sais comment vous exprimer
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ma vive reconnaissance car je suis indigne d'une
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marque si affectueuse de votre part, mais et
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j'espère bientôt si vous me le permettez vous
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témoigner de vive voix mieux que je ne le fais
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incessamment les sentiments affectueux et dévoués
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de votre très humble serviteur
 ...  Si vous saviez combien on est heureux
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lorsqu'il est possible après certaine occupation de
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reposer les yeux sur les arts et la poësie quii
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vous remplacent toujours par une douce illusion
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tant de déception navrantes. Il y a longtemps
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que je ne m'occupe plus de ce qui charmait ma vie
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je laisse souvent au seuil de mon bureau
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mes plus doux souvenirs qui m'apparaissent
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alors comme une pensée de l'Eden perdu et
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souvent mon temps se passe dans les grossières
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et positives réalités de la vie. Peut être
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un jour reviendrai-je à ces charmantes occupations
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et c'est alors surtout si j'ai le bonheur de vous
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rencontrer que je pourrai m'inspirer au souffle
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de vos pensées.
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votre bien dévoué
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